Bientôt minuit, et c'est déjà la fille qui tiendra la réception de mon blockhaus de 17 étages jusqu'à 8h du mat' qui me file ma KeyCard de remplacement – elle m'informe que l'autre se démagnétisera automatiquement d'ici 24h. High-tech.
Bien pratique tout ça. Si l'ascenseur que je prends pour remonter au 12ème avait eu un miroir, j'aurais surement entamé un dialogue imaginaire avec mon reflet. Je me voyais pas passer la nuit dehors en maillot de bain. Quoi? Oui, parce que j'étais allé me faire un petit jacuzzi plus tôt dans la soirée voyez-vous. Il suffit de biper ma UBCCard et oui, c'est gratuit. Tout à fait, ça c'est la lessive que j'ai faite avec ma SmartCard à la laverie du sous-sol. Pratique, oui, c'est vrai.
Schizophrénies et porte-cartes remplis mis à part, UBC c'est pratique quand même. Le « SHHS » (Student Housing and Hospitality Services) , avec un H pour « hospitalité » s'il-vous-plait, reflète bien la perfection presque énervante des rouages qui font tourner UBC. Le côté pratique, « logement», mais aussi, insistons de nouveau histoire d'être lourd, « l'hospitalité ». Une dimension assez en accord avec le « Toujours plus haut, toujours plus loin » ambiant. Next level. Un truc qui déconne dans ton appart'? Un type vient dans ton sommeil pour le réparer. C'est pas qu'une fois par an, et il existe vraiment, j'te jure.
Tes pelouses sont vertes, et partout autour de toi. Les petites nouvelles se font même enduire de compost. Ça induit des effluves traîtresses qui se baladent sur le campus, mais passons: très honorable, jusque-là rien d'anormal. Mais le level d'après, c'est que ce machin vient de chez toi, de la petite caissette en plastique qu'on t'as confié pour disposer de tes peaux de banane ou de tes malaises gastriques.
Le sheitan est dans les détails. Mercredi soir c'est « Pit Night », où selon les mythes 80% du campus passerait au « Pit ». Un mot tellement génial pour désigner le bar le moins cher du campus qu'il serait criminel de ne lui donner qu'une seule traduction (selon Google: trou, cratère, fossé, fosse, dépression, puits...). Vu que ces esquimaux dinent à 5h, ça commence vers 8h. Du coup quand vous arrivez à 22h30 comme toute personne européenne fraichement dépucelée, c'est plein.
Heureusement, on te laisse pas poireauter. Hos-pi-ta-li-ty. A l'inverse de ce qui peut se passer sur les trottoirs des Grands Boulevards, on veut pas te voir casser ta pipe tel Winehouse, achevé par le delirium tremens. Un type du bureau des élèves t'emmène alors to the next level une fois de plus. Littéralement, deux niveaux plus haut, un espace aménagé avec un biergarten improvisé, dans lequel on attend dans la joie et la bonne humeur que son numéro soit appelé au micro. Et l'absence de mezzanine défectueuse t'épargne de finir comme Mehdi.
Tout cela est bien ficelé. Ça ne se limite pas qu'au campus. Le « Metro » jauni posé sur la banquette d'en face relate que la ville de Vancouver prend des mesures, à chaque fois bien précises, que ce soit pour des buts grandioses – atteindre le rang de ville la plus écolo du monde d'ici à 2020 en développant le tri et le ramassage des pelures de patates, ou en réaction à des évènements précis.
A l'image d'un objet qui va peut-être se généraliser à Vancouver suite au choc généré par les émeutes de la Stanley Cup. Il faut dire que les fans sont passés d'un état d'ivresse comparable à celui d'un surdoué de 14 ans le soir de la fin du bac au Champs de Mars, vers un état de dégout comparable à celui de ce même surdoué à qui on annonce qu'il va aux rattrapages. On estime donc qu'il aurait fallu ralentir l'afflux de Canadiens titubants en centre-ville en s'aidant non pas de CRS supplémentaires... mais en installant des tourniquets. Quel obstacle. Vous l'aurez compris, Vancouver n'est pas vraiment une ville à « débordements » fréquents.
Accessoirement, c'est aussi un obstacle qui compte les passagers. Et puis maintenant le débat est ouvert sur les titres de transports à puces nominatives et intégralement traçables, potentiellement désactivables à distance. Pourquoi ne pas passer au next level, tant qu'on y est.
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